Prescripteurs de saines addictions

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    16 décembre 2011

    il est empli de rebondissements, d'intrigues dans l'histoire et d'intervenants, tous plus pourris les uns que les autres ou alors naïfs et manipulés. Efficace de bout en bout ce roman, écrit par un capitaine de la Brigade de Répression du Banditisme.

    Il y a bien quelques détails gênants, comme par exemple l'abondance de sigles des différentes sociétés ou organismes qui interviennent, certes expliqués en bas de page -d'où de nombreuses notes de bas de page- mais non rappelés ensuite. Il y a en fin de livre une liste des sigles utilisés, mais elle n'est pas mentionnée au début et je n'ai vu son existence qu'à la fin de ma lecture. Et puis, une fois dans l'intrigue, les sigles "passent". Ensuite, il faut bien reconnaître que si l'écriture est simple, efficace on n'a pas affaire au styliste littéraire de l'année et les dialogues sont un peu faibles, perfectibles. Ceci étant dit, on ne lit pas ce genre de roman pour ses qualités d'écriture, mais pour s'évader et éventuellement s'instruire. Ce qui est le cas ici. Donc mission pleinement remplie ! Car je dois dire que je ne connaissais pas grand chose aux sociétés de mercenaires ; je savais qu'elles existaient, mais mes connaissances s'arrêtaient à cet état de fait. Là, Marc Wilhem, grâce à son intrigue, nous montre les rouages, les implications des uns et des autres et comment ses sociétés, grassement rétribuées montent des opérations de déstabilisation voire carrément des machinations terribles. "Le temps du mercenariat à la Bob Denard était bel et bien révolu. La place était maintenant aux sociétés militaires -les SMP, ces multinationales de la barbouzerie qui permettaient aux grandes puissances de "tertiariser" certaines opérations tout en gardant les mains propres." (p.41)

    Les connivences entre ces gens-là, les politiques et les journalistes -enfin, certains journalistes : "Aujourd'hui, la profession est une vraie merde. Les journalistes politiques ne font que des commentaires sportifs, comme si les élections n'étaient qu'un jeu. [...] Rien sur le fond, sur les idées ; ces peigne-culs ne sont même pas capables de ressortir les déclarations de l'année précédente pour mettre le doigt sur les contradictions des discours. Je te le dis, petit : que des commentateurs sportifs. Et ils ont raison vu que les journalistes sportifs, eux, font du people. Ils ne critiquent jamais les joueurs de foot, magnifiques, brillants, somptueux, héroïques... Les rois du superlatif. Les seuls à secouer un peu leurs clients sont les journalistes people. En fait, chacun fait le boulot de l'autre." (p.80)- les connivences disais-je sont montrées, démontrées. Instructif et effrayant. Effrayant, parce qu'on se demande qui gouverne qui ? Pourquoi ? Qui manipule ? Dans quel but ? Le Graal ? Le pouvoir bien sûr, et tout ce qu'il apporte : la notoriété, la puissance, la gloire et l'argent.

    Un thriller politiquement incorrect qui montre les abus des uns et des autres. Un roman diablement efficace, captivant, crédible et réaliste, c'est d'ailleurs sans doute ce qui fait le plus peur.

    En prime, en fin de volume, les éditions scrineo éditent un dossier écrit par un spécialiste (ici, Jacques Massey, journaliste spécialisé défense renseignement et sécurité) qui éclaire et analyse le système des SMP, des contractors. Instructif également, et exemples à l'appui, cette analyse crédibilise le roman qui la précède.

    Comme quoi, on peut se faire plaisir en lisant des thrillers intelligents qui donnent à réfléchir et complètent notre instruction.