Le corps plein d'un rêve

À la fin des années 70, dans un ancien village de pêcheurs, à trente kilomètres
de Marseille, une jeune fille de seize ans, maigre et timide, entend la voix d’une autre fille maigre et timide qui, à trente ans, avec son premier disque, est devenue une star. Avec Horses, Patti Smith entre dans sa légende. Celle d’une artiste aux multiples talents, chanteuse mais aussi poète, inclassable et rebelle. À l’instar de tous les fans, l’adolescente va nouer une correspondance secrète avec son idole : la voix de Patti est devenue révélatrice de son propre vertige. « On projette toujours ce qu’on est, ce qu’on n’est pas, ce qu’on voudrait être, ce qu’on croit être, sur les artistes. Ils sont là pour nos rêves, nos utopies. Pour nos faiblesses.
Pour nos illusions. Pour nos grandeurs », écrit Claudine Galea.
Pendant trente ans, le dialogue ouvert en 1976 au bord de la Méditerranée s’est poursuivi en secret, depuis le concert à Pantin en 1978 jusqu’à la lecture donnée par Patti Smith des Vagues de Virginia Woolf, à la Fondation Cartier, en 2008. Entre-temps, Claudine Galea, devenue écrivaine, a reçu une commande de France Culture pour une série intitulée « Les icônes du rock ». La voix de Patti s’est alors à nouveau imposée, et sa puissance a fait remonter en surface ce temps de l’adolescence, quand son corps a été aimanté par la voix de la chanteuse, brûlé par le magnétisme de cette voix.
Le corps plein d’un rêve raconte l’histoire d’une vie qui s’accomplit à travers
la création. Un double-portrait en forme de dialogue fictif, ou plutôt un
dédoublement, qui nous parle de l’impérieux besoin de liberté, de la volonté
d’inventer sa vie par les mots. De la jubilation d’être multiple, du désir d’être aimée. Patti Smith mais aussi Marguerite Duras, ou encore Virginia Woolf
traversent ce livre. Avec l’énergie pure du rock ’n roll, avec sa rage, Claudine Galea donne là une performance littéraire, tout aussi protéiforme que son modèle.