Prescripteurs de saines addictions

Monet, money, Roman noir

Henri Bonetti

Cohen & Cohen éditeurs

  • Conseillé par
    12 octobre 2016

    Depuis qu'il a été viré de son poste de cadre à la banque, Benoît Thérin rêve de se venger de son ancien ami qui fut aussi son directeur et donc l'artisan de sa mise à la porte, Ludovic Taillefer. Ce même Ludovic Taillefer, lui-même viré quelque temps plus tard, un type imbuvable, est l'heureux possesseur d'un tableau de Claude Monet, exposé dans sa luxueuse villa méditerranéenne. Ce tableau est volé. Entrent alors en scène, Karim Kacem, enquêteur pour la compagnie d'assurances, Nathalie fonctionnaire des impôts qui veut se payer Taillefer, exilé fiscal, Ange, un truand qui veut faire son come-back avec un vol de Monet, plus quelques seconds couteaux...

    Tout cela a l'air confus... et rien ne l'est. Le talent d'Henri Bonetti est de ne jamais nous perdre entre les divers protagonistes qui se croisent sans se connaître, puis finissent par se connaître. Ils ont tous en commun cette toile de maître, inconnue et pourtant tant convoitée. Le romancier procède par petits chapitres, eux-mêmes calibrés en courts paragraphes, ce qui fait qu'on a le temps de se repérer dans ses nombreux personnages, et je vous le dis ici, si je ne me suis pas perdu, aucun risque que vous ne le fassiez, tant je me perds aisément lorsque les entrées d'un roman sont multiples.

    Je me suis régalé de bout en bout. L'auteur harponne le lecteur dès les premiers mots et ne le lâche plus avant la toute fin, bouquet final de cette aventure formidable. Le rythme est enlevé, alerte, les personnages sont parfois pitoyables, mesquins, désagréables, sympathiques... Certains restent tout du long ce qu'ils sont réellement tandis que d'autres changent parfois radicalement et se retrouvent dans des situations dans lesquelles on ne les attendait pas. Les seconds rôles ne sont pas en reste, bien présents et décrits, comme des seconds rôles de cinéma, du temps des grands polars français : on pourrait presque voir les gueules de ceux qui jouèrent ces rôles et qu'on a tous en tête sans connaître leurs noms.

    C'est plein de rebondissements, des choses joyeuses, car ce roman est avant tout joyeux, c'est une aventure qui si elle ne décroche pas de gros rires laisse le sourire aux lèvres parce qu'il faut bien le dire, tous ces gangsters et apprentis gangsters forment quand même une belle bande de loosers.

    Hyper agréable à lire, le temps passe à un rythme fou, en fait c'est en arrivant à la fin qu'on remarque qu'on vient de lire 300 pages. Le genre de polars que l'on emporte partout pour profiter de cinq ou dix minutes d'attente ou de temps libre pour avancer dans l'histoire. Un coup de coeur polar.

    Et comme toujours dans cette collection Art noir de chez Cohen&Cohen, le livre est très beau, tranches et couverture noires à peine colorées d'une petite représentation d'une toile de Monet et du texte en blanc. Je suis devenu accroc à cette collection...

    PS : et ce titre qui sans cesse me met en tête Abba : "Money, money, money"... Y'a pas de raison que je sois seul à souffrir avec cet air toute la journée.