Prescripteurs de saines addictions

EAN13
9782877042840
ISBN
978-2-87704-284-0
Éditeur
"Éditions Unes"
Date de publication
Nombre de pages
96
Dimensions
21 x 15 x 0,1 cm
Langue
français

Asile

"Éditions Unes"

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Voilà un poème qui traverse le blanc. Les couloirs, les chambres, les murs blêmes de l’asile. Poème de craie, poème de neige, où même le soleil est blanc « comme un couteau », poème d’une femme qui cherche une voix dans la solitude et l’enfermement. On traverse la répétition des gestes et des jours, la toilette, les médicaments, le réfectoire, les consultations avec le docteur. L’impossibilité de dire que cette répétition même est un enfermement, que l’on se trouve ici dans le lieu de la disparition des couleurs et des ombres, que toute possibilité de parole disparaît dans l’uniformité blanche de la solitude. Le temps circule sous les draps, « on ne dort jamais vraiment », les nuits sont blanches, comme le fond des yeux dans ce lieu où « personne ne regarde personne ». Solitude, ou claustration, ou silence sont la même chose, il s’agit de la même disparition, mais sans la possibilité de disparaître. Des corps, il ne reste que les odeurs et la proximité, c’est-à-dire le seul poids d’être. Des voix, juste du silence ou des cris. Dans l’asile, « on meurt plusieurs fois », on perd sans savoir exactement ce que l’on perd, sans pouvoir le retenir, avec la crainte de rester seul. Seul avec soi dépossédé de soi.
Autour de cette étrange trinité, « elle », « doc », « ici » qui sont les personnages de cette pièce des « solitudes », le poème opère lentement une recherche d’espace impossible, de sortie, une transfiguration du rêve en vagues, en oiseaux. Toujours la mer est un ailleurs dans les livres d’Erwann Rougé, non pas pour sauver ou se sauver – et se sauver de quoi, d’où et de qui ? – mais pour ouvrir, ouvrir cet « ici » qui petit à petit l’efface « elle », fermée à double-tour au fond d’elle-même. « Si seulement être c’était d’être vague et vague » dit-elle en rêvant la mer par la fenêtre, ou en elle, cherchant à s’oublier au point d’atteindre à la coïncidence de soi et de la marée, de l’emportement, de la houle. Même être une algue, une liane noire. Ou un croassement, une corneille, un chant noir dans le ciel, dehors. Être un oiseau noir comme seule façon d’être un ange et de pouvoir enfin « effleurer sans blesser », de pouvoir enfin sortir vers la mer et le ciel bleus.
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